Le 10 juillet 2018, Brune Poirson, Secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire annonçait lors d’une séance de questions à l’Assemblée “Si on veut que les Français participent à la , il faut que celle-ci soit solidaire !” en faisant référence au Plan Climat annoncé en 2017. Qu’en est-il de la considération du climat aujourd’hui? Sommes-nous solidaires de celui-ci? Que faisons-nous pour le préserver?

Les conférences régionales pour la transition énergétique se multiplient dans toutes les régions mais aucune d’entre elles n’aboutit un cadre contraignant au niveau législatif et l’impact sur les budgets n’est qu’infime quand on voit la mise en place de la transition énergétique dans les 13 régions françaises. 29 novembre 2017 pour la Bretagne, 23 mai 2018 en PACA, 4 juin 2018 en Nouvelle-Aquitaine… les occasions de parler sont nombreuses mais pour agir, qu’en est-il ?

De la COP 21 à aujourd’hui

Une transition énérgétique initiée à Paris

En décembre 2015, lors de la Conférence de Paris sur le climat (COP21), 195 pays dont la France signent un accord (historique) juridiquement contraignant pour éviter un changement climatique dangereux et irréversible. Les promesses de l’Accord de Paris étaient-elles promises à l’échec ? A s’offusquer de la sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris, la France ne devrait-elle pas regarder l’avancée de ses projets et revenir sur l’importance accordée dans les programmes politiques à tous les niveaux (national, régional, départemental…) à la lutte contre le changement climatique en cours ?

Le redécoupage des régions de 2015 a été un véritable casse-tête pour l’établissement des budgets. Les priorités de chacun sont à redéfinir, les volontés politiques sont à apaiser et à coordonner, et chacune des régions a dû mettre de l’eau dans son vin pour trouver un équilibre budgétaire et une répartition des montants alloués qui convienne à tous.

Dans cette répartition, il y a un grand perdant: LE CLIMAT, et avec lui la transition énergétique ainsi que tous les bénéfices qui devraient aller de pair. Cette alliance aurait déjà dû permettre au climat de pâtir chaque jour un peu moins de l’activité humaine. La transition énergétique est l’un des sujets de prédilection des différentes régions. Un sujet de communication, un sujet de débats et de concertation mais trop peu souvent un sujet d’actions. Si certaines régions font des efforts colossaux pour considérer le sujet de l’environnement et plus particulièrement celui de la transition énergétique, la disparité selon la localisation ne permet pas de donner de dynamique globale au pays.

Si l’Accord de Paris n’a pas réuni à l’unanimité (et connaît déjà un premier pays sortant), il voit en miroir le reflet d’une France parfaitement désunie qui n’a pas saisi l’ampleur de la tâche qui incombe aux dirigeants, celle de donner l’exemple dans le domaine de la transition énergétique et d’agir, enfin AGIR.

Budget et climat ne font pas bon ménage

Pour les régions les plus investies, le montant alloué à l’environnement représente jusqu’à 20% du budget de la région, tandis que pour les moins intéressées et investies, l’environnement et son amie la transition énergétique sont reléguées au dernier plan représentant plus ou moins 1% du budget global.

Plusieurs régions blâment les coupures budgétaires de l’Etat et d’avoir eu à réduire la voilure, soit leur coût de fonctionnement et le train de vie de la région. Ces arguments sont recevables mais ce qui est inquiétant c’est la part dédiée à l’environnement et donc à la transition énergétique. Que les budgets diminuent, il n’est pas question de le nier, que la part dédiée aux sujets de demain et à l’avenir du climat soir ridiculement bas, il est plus que temps de s’en inquiéter. En analysant les budgets, on note des chiffres particulièrement ridicules face à un enjeu aussi important: 1,4% du budget pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, 1,23% pour la région Bretagne, 0,5% pour la région Normandie… trois exemples très parlants, sur les 13 régions que compte la France, qui malheureusement ne sont pas les seuls.

Malgré les alertes à répétition de Greenpeace, les Etats ne sont pas à la hauteur et contenir le réchauffement climatique à +2 degrés semble quasi impossible avec cet ordre des priorités dans l’établissement des budgets.

 

Paroles, paroles, paroles

L’accord de Paris

En 2015, la COP21 et l’Accord de Paris sont la promesse d’un avenir plus vert où l’environnement est au coeur des enjeux de demain. Avons-nous crié Cocorico trop vite ? Avons-nous voulu donner des leçons sans balayer devant notre propre porte ? N’avons-nous pas oublié de mettre en oeuvre (en temps et en heures, avec les moyens appropriés) les principes de notre accord ?  La réponse est oui, trois fois oui.

L’Accord de Paris, c’est normalement la mise en marche de la transition énergétique à l’international. Cela devait être l’impulsion d’un nouveau souffle pour le climat et l’environnement, avec en tête de liste, la transition énergétique.

Que met-on derrière l’appellation “transition énergétique”?

 

  1. La transition énergétique est un des principaux volets de la transition écologique.
  2. Elle implique une modification profonde et sur le long terme des modes de production et de consommation de l’énergie.
  3. Elle a pour objectif de passer à un mix énergétique principalement basé sur les énergies renouvelables

La transition énergétique comporte des dizaines d’activités, de volets. Il peut être facile de s’y perdre et de faire de cette expression un véritable fourre-tout. Les principaux scénarios de la transition énergétique impliquent de moins consommer et de mieux consommer l’énergie. La croissance de la population a impliqué ces dernières décennies une hausse de la consommation d’énergie. L’énergie est devenue indispensable pour faire fonctionner les équipements, les réseaux de transport, les objets connectés, assurer les réseaux de communication, simplement vivre au quotidien. La répartition de la consommation (comme de la production) est pourtant bien déséquilibrée. Il existe une réelle fracture Nord-Sud comme on peut le voir avec un simple exemple, l’Asie, les Etats-Unis et l’Europe consomment plus de 60% de l’énergie produite sur Terre tandis que l’Amérique du Sud n’en consomme qu’à peine plus de 6%. La transition énergétique ne sera pas aussi difficile pour tout le monde.

La majorité de la production d’énergie aujourd’hui (+/- 58% au niveau mondial) provient des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz…) qui sont les plus polluantes. L’objectif de la transition énergétique est de réduire la consommation d’énergies fossiles au profit d’énergies renouvelables (éolienne, solaire, énergie des marées, géothermie…). Pour être dans un objectif de transition énergétique, il faut allier le consommer “mieux” (en polluant moins) et le consommer “moins” (diminuer sa consommation d’énergie). Les mots d’ordre que nombre de responsables politiques, économiques, scientifiques mettent en lumière sont rigueur et responsabilité. Le climat pâtit de l’activité humaine, il est de notre responsabilité de réparer au plus vite nos erreurs, en passant d’une réflexion d’économie linéaire à celle d’une économie circulaire.

La production des énergies renouvelables est à la source de production extrêmement variables certes, mais elle est cumulable. Cela peut permettre de limiter voire d’éviter la dépendance énergétique. L’UE est fortement dépendante énergétiquement parlant. Sa production ne permet aujourd’hui pas de pallier à ses besoins, ce qui fait d’elle la 1ère importatrice d’énergie au monde.

La transition énergétique vise à consommer mieux et moins, en limitant le gaspillage pour laisser aux générations futures une terre leur permettant d’assurer leurs besoins.

La responsabilité des régions

 

Avec des sujets aussi importants que le climat et la préservation de l’environnement, chaque subdivision territoriale doit être impliquée. L’Etat ne peut être le seul intervenant (aujourd’hui bien trop faible pour les objectifs loin d’être atteints, ni en passe de l’être). En opérant une refonte globale de la carte des régions, il est nécessaire de les intégrer dans cette étape cruciale du développement du pays, celle de la transition énergétique,  vers un pays plus vert. Lors de la COP 21, si des délégations régionales étaient présentes, il y a aujourd’hui un goût amer quand on voit le budget investi par région. Aucune harmonisation, des écarts de budget (en pourcentage du budget) investi colossaux de 0,4% du budget global à 20%.

Des régions font des efforts (+300% de budget dédié à la transition énergétique en PACA entre 2017 et 2018) et d’autres pourtant fortement touchés par les changements climatiques n’ont rien changé et certaines ont même diminué la part dédiée à l’environnement et à la transition énergétique.

La transition énergétique d’un pays morcelé

Chaque région se targue d’être la plus investie dans la transition énergétique. Depuis 2017, l’Occitanie se réclame comme la future première région à énergie positive. La Nouvelle-Aquitaine se vante d’être à “la pointe de la transition énergétique” ou encore la Bourgogne-Franche-Comté qui se revendique comme une des régions où grandissent le plus de TEPOS (territoires à énergie positive). Les prises de paroles des élu(e)s sont extrêmement nombreuses pour valoriser un terrain de jeu où les politiques publiques ne reflètent absolument pas le rôle de leader présupposé sur le sujet.

+300% en PACA pour la transition énergétique

Le budget environnement de la région Provence-Alpes-Côtes-d’Azur ne décroche pas la première place mais une mention honorable avec une attribution de 20% du budget global. Cette distinction s’accompagne d’un deuxième élément notable, qui fait d’elle, la région à suivre en 2018. La transition énergétique à elle seule se voit dotée d’un budget de 6 millions d’€, soit une augmentation de 300% par rapport à l’année précédente. La région se veut exemplaire en matière d’environnement et la volonté du président de région est de faire du PACA la première collectivité territoriale d’Europe à décliner le pacte mondial pour l’environnement de l’ONU.

Sur un budget global de 2,5 millards d’€, on voudrait une part dédiée plus importante pour pouvoir répondre aux objectifs de la région. Pour favoriser un développement durable et équilibré du territoire, la région veut continuer de développer un dispositif à 4 axes :

  1. aménagement
  2. transition énergétique
  3. développement économique
  4. mobilité

La région PACA organise régulièrement des conférences pour la transition énergétique mais de là ne sont sorties aucunes velléités pour un budget plus important, ni de confrontations entre les envies, les projets et la part de budget correspondant. A l’échelle d’une région, les six millions d’€ partent en fumée en quelques mois.

La Nouvelle-Aquitaine

L’une des grandes gagnantes 2018 est la Nouvelle-Aquitaine qui veut faire de la transition énergétique une de ses grandes priorités régionales. Avec un budget dédié de plus de 13%, la Nouvelle-Aquitaine a déroulé un véritable programme d’attaque pour mettre le pied à l’étrier de la transition énergétique. C’est un coup de pouce pour la transition énergétique étant donné la taille de la région. Quelques exemples d’actions:

  1. Réduction de l’empreinte énergétique en portant la part des EnR à 23% avant 2020 et à 32% avant 2030
  2. Soutenir la construction durable
  3. Améliorer la performance énergétique des entreprises

A l’origine de la création du Conseil Permanent de la Transition Ecologique et du Climat (COPTEC), la Nouvelle-Aquitaine a voulu créer une instance pour itérer sur les sujets de transition énergétique et autres. Une nouvelle bulle de fumée pour cacher l’inaction? Après 6 ans d’existence, le débat prime sur l’action mais l’organisation a le mérite d’exister et de cadrer les projets. Cet organe permet la création d’un réseau d’acteurs du territoire et s’il n’est pas à l’initiative des plus grands projets, il fait se rencontrer les bonnes personnes. Le vrai bémol? Qu’un projet de réflexion se cantonne à monter des stratégies et projets sans les mettre réellement en place, la préparation est décorrélée de la réalisation. Echanges, partages, élaborations de projet sont au programme, mais le temps passe et la qualité de l’environnement avec, il est temps d’agir. Agir plus, agir mieux.

La Bretagne, pleine de ressources… mais pas financières

En Bretagne : 1,23% du budget régional est dédié à l’environnement. Le pronostic vital de l’environnement est engagé, la transition énergétique a du mal à décoller et c’est une pétition pour qu’un émoji “drapeau breton” soit créé qui accapare l’attention en 2018. La pétition recueille plus de 8 000 signatures et si les combats ne s’annulent pas, on peut avoir la sensation que les priorités ne sont pas toujours où l’on aimerait les retrouver.

En Bretagne, 41% du territoire régional est maritime soit environ 19 000 km2, une aubaine pour l’énergie éolienne. Si les projets d’éoliennes offshore et d’éoliennes terrestres à grande échelle sont extrêmement longs à mettre et complexes à faire valider au niveau régional mais aussi étatique, il est compréhensible que cela prenne du temps. Mais pourquoi ne pas développer des initiatives locales pour des éoliennes implantées chez les particuliers ? Toutes les régions françaises ne sont pas dotées des mêmes ressources d’énergie renouvelable. Ensoleillement, courant maritime, énergie éolienne, courant fluvial, précipitations… ne sont pas les mêmes dans tous les départements. La Bretagne fait partie des mieux dotées entre vents et marées. 

Pour une région qui fait d’un de ses principaux chantiers, la réussite des transitions. On ne peut être que déçus face à un budget si ridicule. Seuls 19 millions d’€ sont consacrés aux projets environnementaux. Et si les initiatives sont belles, difficiles de croire qu’elles vont pouvoir prendre de l’ampleur. Si la Bretagne a décroché le rôle de région pilote dans le développement des énergies marines, il va falloir un renforcement de budget venu d’ailleurs pour avoir de réels tests et des expériences probantes à délivrer dans les prochaines années. La facilitation de l’essor des parcs éoliens est un des objectifs, difficile à atteindre avec les obstacles de positionnement géographique des parcs mais également par manque de budget dédié aux rencontres citoyennes pour amener à mieux appréhender les projets.

Le pacte électrique breton

On ne désespère tout de même pas pour la région Bretagne qui est à l’initiative du pacte électrique breton. Régulièrement en situation de fragilité électrique de par la faible production et la situation géographique, la Bretagne veut remédier à une dépendance énergétique notamment avec un axe de travail qui est celui du développement important de la production d’énergies renouvelables avant 2020. Mais à nouveau les objectifs restent en deçà des attentes, huit ans après le début du programme.

 

Loin de nous l’idée de penser que rien ne se fait, simplement tout se fait à trop petite échelle. A faire des économies de bout de chandelle dans tous les domaines, c’est l’environnement qui en pâtit en premier.  Rien ne se sert de développer des réseaux de transport, de rénover des universités pour les générations futures, de développer des programmes sportifs accessibles à tous, si l’air de demain n’est plus respirable et les productions et consommations d’énergie non maîtrisées. La force financière des pays dits du Nord doit être repensée. Cela ne servira plus à rien de sauver les banques si plus personne n’est en mesure de les faire fonctionner…

La transition énergétique n’aura pas lieu ! Tout du moins pas grâce aux efforts de 2018…

Pour en savoir plus sur la transition énergétique en direct, retrouvez les données d’ENEDIS sur la consommation et la production d’énergie en direct ici.

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