Le bilan annuel de GRTgaz a dévoilé que la consommation de gaz des Français a drastiquement chuté en 2023, atteignant son niveau le plus faible depuis le début des années 90. Cette dynamique se confirme en ce début 2024. La baisse de 10% par rapport à 2022 peut s’expliquer par l’importance des efforts collectifs de sobriété énergétique, et par plan gouvernemental d’octobre 2023. Néanmoins, la crise économique et les températures particulièrement chaudes sont d’autres facteurs à prendre en compte.

Transition écologique en marche ou conséquences de la crise économique et géopolitique ?

GRTgaz a souligné dans son bilan annuel que la consommation de gaz des Français a connu une baisse massive en 2023, et a été portée à son niveau le plus faible depuis 1990 : passant sous la barre des 400 TWh, elle a seulement atteint les 381 TWh. Une baisse de -11,4% sur toute l’année, qui révélerait une transformation du rapport des Français à l’énergie.
Sandrine Meunier, nouvelle directrice générale de GRTgaz, explique ainsi à l’AFP “C’est un élément important qui démontre une vraie évolution de la consommation de gaz.” Cette dynamique semble se confirmer début 2024.
Reste à savoir si cette baisse est provoquée par un regain de conscience écologique, ou par l’inflation qui continue d’ébranler le pays.

Un repli historique

Depuis 2021, la consommation de gaz ne cesse de reculer. On observe une baisse de 20% entre 2021 et 2023, années durant lesquelles les besoins en énergie se sont respectivement élevés à 474 TWh et 381TWh. En 2022, la consommation a atteint les 430 TWh, engrangeant cette dynamique de baisse : c’est donc bien en 2023 que le gaz a connu son repli le plus spectaculaire, passant en dessous des 400 TWh. Une évolution impressionnante sur 10 ans : en 2010, les besoins des Français avaient atteint les 547 TWh.

La consommation de gaz russe est également retombée l’année passée : alors qu’elle répondait à 17% des besoins français en 2022, elle a seulement atteint les 9% en 2023 selon GRDF. Des chiffres qui soulignent la diversification d’approvisionnement mise en place par la France au cours de l’année, ainsi qu’une modification des comportements des consommateurs.

Une nouvelle sensibilité à la transition énergétique

Cette tendance de chute de la consommation de gaz est constatée depuis 2021, et a d’abord pu s’expliquer par la crise de la guerre en Ukraine, la flambée des prix des énergies, et l’inflation galopante.
Le recul des besoins en gaz s’est confirmé en 2023, et début 2024. Sandrine Meunier indique pourtant à l’AFP “une stabilisation des prix du gaz en Europe et un retour à leurs niveaux d’avant-guerre.” En effet, le prix moyen du gaz sur les marchés de gros a aujourd’hui diminué de moitié par rapport à la fin 2023, passant de 43 euros le MWh à 22 euros. C’est 5 fois et demi moins cher que les prix pratiqués en 2022 (121 euros), lors de la crise et de la réduction des approvisionnements de la Russie vers l’Europe.

Dans un communiqué, GRTgaz explique que cette chute “reflète de nouveaux comportements en matière de sobriété et d’usages.” L’effort collectif des consommateurs et l’utilisation décroissante du gaz dans la production d’électricité seraient les facteurs clé pour comprendre cette baisse. Néanmoins, la hausse brutale des températures en 2023 – deuxième année la plus chaude jamais enregistrée en France – et l’inflation pourraient également expliquer cette tendance de consommation.

L’importance des industriels

Nous commençons à voir apparaître des substitutions entre énergies.” a indiqué Sandrine Meunier à l’AFP pour évoquer la part de moins en moins importante du gaz dans la production d’électricité. L’industrie est au cœur de cette transformation : certaines utilisations industrielles commencent en effet à s’électrifier.
On observe un recul important de la consommation des industriels les plus énergivores (verre, chimie, sidérurgie…), avec un recul de -7,4% (103,8 TWh), après une première baisse de -11,5% en 2022. La baisse s’élève à -18,2% depuis 2021, ce qui suggère également que la hausse des prix a obligé certains acteurs à ralentir leur activité.

Du côté des distributions publiques (ménages, petite industrie, service tertiaire…) on observe un recul de -6,5% par rapport à 2022, avec correction des aléas climatiques et effets calendaires. Il fait écho à la baisse constatée entre 2021 et 2022, qui s’élevait à -6,2%.

Si 2022 a été marquée par une période d’instabilité nucléaire, à cause de la corrosion de plusieurs réacteurs, 2023 signe une accélération de l’énergie. La disponibilité de l’énergie nucléaire cette année a permis d’observer un recul de l’utilisation du gaz pour produire de l’électricité, avec un retour aux niveaux de 2021 (36 TWh). Une chute significative de 40% par rapport à 2022.

La consommation européenne

Toute l’Europe discerne un recul de sa consommation de gaz, intégrant la France dans cette dynamique globale. Le groupe de réflexion international IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis) a publié un rapport qui signale que la consommation de gaz a atteint son niveau le plus faible depuis 10 ans en Europe. Le rapport de l’organisme explique ce phénomène par l’accélération de la transition énergétique : “les pays intensifient leurs mesures d’efficacité énergétique et le déploiement des énergies renouvelables.

L’organisme met en exergue l’importance de la situation géopolitique mondiale, qui peut aussi donner des pistes d’analyse. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a profondément transformé le marché de l’énergie. La demande européenne de gaz a ainsi diminué de 20% depuis 2021, particulièrement en Allemagne et en Italie.

La fermeture des voies de transports d’hydrocarbures russes par gazoduc a poussé les pays européens à trouver d’autres sources d’énergies : le gaz naturel liquéfié, transporté par bateau, devient prédominant dans la consommation européenne. Entre 2022 et 2023, l’approvisionnement de cette ressource a augmenté de 6%. Sandrine Meunier explique ainsi à l’AFP qu’ “en 2023, le système gazier européen se consolide et s’adapte à la baisse des flux venant de Russie.

Il faut néanmoins noter que fin 2023 la part d’importations de gaz naturel liquéfié russe est toujours importante en France, avec 15% du total des ressources.

Si en 2022 la France a importé plus qu’elle n’a exporté, elle a retrouvé sa place de choix sur le marché de l’exportation en 2023. Profitant de la restructuration du réseau européen, elle a généré 22% des flux d’approvisionnement en gaz naturel liquéfié. Les futures réformes en matière d’électricité et de gaz à l’échelle de l’Europe pourraient continuer de transformer le marché.

Quel avenir pour le gaz ?

En dépit de cette dynamique de baisse, Sandrine Meunier a affiché sa confiance pour les années à venir, face aux journalistes de l’AFP : “Sur les années 2023-2025, nous serons plutôt sur une tendance stable de la consommation de gaz en France. Nous ne présentons pas une dégringolade qui s’accentuerait dans les années à venir.

Le réchauffement climatique, qui a impacté les températures de l’année 2023, l’intérêt croissant pour l’écologie des Français et l’inflation pourraient néanmoins constituer des freins aux prédictions de GRTgaz.

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