EDF a annoncé la signature avec Gravithy d’une lettre d’intention qui devrait mener à la conclusion d’un contrat d’allocation de production nucléaire (CAPN). Ce CAPN permettra à la start-up, orientée depuis juillet 2022 vers le développement de fer bas carbone, d’assurer une partie de l’approvisionnement en électricité de sa future usine de Fos-sur-Mer.

Pari risqué pour EDF. C’est à l’aube d’une réforme du marché des énergies que le groupe annonce la signature de son troisième contrat d’allocation de production avec GravitHy, une start-up spécialisée dans la production de fer bas carbone.

Innovante et pionnière, GravitHy est en train de développer la première usine de production DRI/HBI (Direct Réduction Iron / Hot Briquetted Iron) à faible émission de gaz sur le territoire français.

Localisée à Fos-sur-Mer, elle permettra de produire de l’acier par réduction directe d’hydrogène, obtenu grâce à une électricité à faible émission de carbone, issue du parc nucléaire d’EDF.

Un défi important pour le producteur d’énergie, qui se prépare à appliquer les nouvelles normes qui régiront son activité à compter du 1ᵉʳ janvier 2025. La fin de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) s’apprête également à transformer le marché de l’énergie.

Les contrats d’allocation de production nucléaire

La conclusion d’un CAPN sécuriserait l’accès de GravitHy à une partie de ses besoins en électricité. Les électrolyseurs nécessaires au développement de l’hydrogène utilisé pour produire l’acier requièrent en effet des quantités massives d’énergie. Marc Benayoun, directeur exécutif du groupe EDF indique ainsi au Figaro : “Quand les activités de GravitHy tourneront à pleine puissance, ce sera un des plus gros clients d’électricité en France.

Pensés pour répondre à ce type de besoins, les contrats d’allocation de production nucléaire sont définis par EDF comme des textes de partenariat industriel “permettant de mettre à disposition d’entreprises électro-intensives une quote-part de la puissance du parc nucléaire en exploitation, pour une durée de plus de 10 ans, moyennant un partage de ces coûts et des risques sur les volumes effectivement produits par ce parc.

La signature d’une lettre d’intention avec EDF permettra donc à la start-up de garantir le volume d’électricité requis pour le développement de son projet. Les prix pratiqués seront proportionnels à la production nucléaire : plus les quantités d’électricité seront importantes, plus le prix sera bas.

Marc Benayoun a néanmoins expliqué au Figaro qu’il ne s’agissait pas de faire du profit : “Avec ces contrats de partenariat, nous ne réalisons pas de marge et nous passons directement les coûts de production auxquels viennent s’ajouter les coûts de transport et les taxes, au client.

Pour contrebalancer les montants engagés, l’entreprise procure à EDF une avance en tête : il s’agit d’une participation aux investissements passés et aux coûts futurs de démantèlement du parc nucléaire.

Des projets bas carbone

Le partenariat entre EDF et GravitHy s’inscrit dans un projet de décarbonation commun aux deux entités. L’objectif de la start-up est d’atteindre une réduction de 90 % de l’empreinte CO2 du fer nécessaire à la production d’acier. Le marché de l’acier décarboné connaît en effet une importante croissance, poussée par les sidérurgistes qui souhaitent produire de l’acier vert, et par les clients de l’industrie des transports ou de la construction en quête de composants bas carbone.

Dans un communiqué de presse, EDF indique ainsi que l’usine de GravitHy “incarnera l’avenir du fer décarboné sur la façade méditerranéenne et sera la première d’une série.

Ce partenariat rappelle l’engagement grandissant d’EDF envers la transition énergétique. Un projet qui pourrait être soutenu par une start-up comme GravitHy : “Notre mission de décarbonation de l’industrie sidérurgique est intrinsèquement liée à l’approvisionnement en électricité verte et bas carbone, en quantité suffisante et à un prix compétitif. Nous nous félicitons de cette étape majeure avec EDF, qui vient conforter encore davantage la mise en œuvre de notre première usine de fer de réduction directe à Fos-sur-Mer.”, indique José Noldin, le directeur général de la start-up, au Figaro.

L’acier produit par la firme pourrait également permettre de construire des éoliennes, et rendre le marché photovoltaïque plus vert. Le Gouvernement a ainsi apporté son soutien à l’entreprise en février 2024, grâce au plan France 2030, félicitant l’ambition du projet.

Marc Benayoun a expliqué au Figaro : “Les projets comme ceux de GravitHy ont une importance centrale pour la transition énergétique, notamment dans l’industrie métallurgique, source de 8 % des émissions mondiales de CO2 $. Il témoigne de l’ambition d’EDF d’accompagner ses clients électro-intensifs en proposant des solutions adaptées et lui permet de stabiliser ses revenus en engageant ses partenaires dans la durée dans une logique de partage des risques et des coûts du parc nucléaire.

Une déclaration qui signale la possibilité de nouveaux contrats, dans un contexte de refonte du fonctionnement d’EDF.

Une ébauche de l’avenir de l’électricité en France

Moment charnière pour EDF et le gouvernement. Les projets de réforme et la fin de l’ARENH transforment profondément le marché de l’énergie : pour proposer des prix compétitifs, EDF s’accordait jusqu’à aujourd’hui au tarif ARENH.

Pour l’heure, 100 térawhattheures de la production nucléaire du groupe sont revendus 42 euros le mégawhatteure aux fournisseurs alternatifs, mais à compter de 2025 l’ARENH disparaîtra laissant place à un nouveau dispositif, plus complexe.

Le prix moyen de l’électricité du parc historique nucléaire d’EDF avoisinera alors les 70 euros sur quinze ans : un changement qui encourage déjà les firmes electro-intensives à se rapprocher d’EDF, signalant un tournant en faveur de l’industrie. Cette nouvelle réglementation devrait aussi impacter les consommateurs.

Les trois CAPN signés par EDF à ce jour répondent à la transformation à venir du marché de l’énergie, raffermissant les liens du groupe aux firmes françaises. La signature d’accords commerciaux pensés sur le long terme donne aux entreprises une prévision fiable des coûts de leur approvisionnement en électricité, ainsi qu’une sécurité accrue d’accès à l’énergie.

ArcelorMittal, acteur de la sidérurgie, a été le premier à signer : il a été suivi par une firme dont l’identité n’est pas encore connue, et par GravitHy. Le nom de TotalEnergies a aussi été évoqué : les besoins en électricité du groupe grandissent avec son activité industrielle, et un partenariat d’ampleur pourrait voir le jour.

De plus petites firmes pourraient également signer des CAPN à l’avenir, signalant l’intensification de l’activité d’EDF avec les entreprises. Un présage d’accélération pour l’industrie française.

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